Juvisy Mag | juin 2021

19 // 299 // Juin 2021 // Magazine d’informations municipales Patrick Deleuze Issu d’une très ancienne famille juvisienne, Patrick Deleuze est considéré comme le père de de la topographie dans l’archéologie moderne. De Karnak à Louxor, du Soudan à Alexandrie, il a inscrit le nom des Deleuze dans l’histoire prestigieuse de cette discipline, mais sa plus grande gloire reste son amour immodéré pour l’Égypte et l’ensemble des connaissances qu’il a accumulées durant sa vie. La famille Deleuze est étroitement associée à Juvisy, mais aussi à la musique. Facteurs de piano de génération en génération, les Deleuze ont servi des musiciens exigeants durant des décennies. Patrick n’a cependant pas choisi cette voie. Pour lui, tout était écrit dès l’adolescence : après des études de géomètre expert, il devait reprendre le cabinet de Jacques Poussin, son parrain. Pourtant, la vie fait souvent de nous ce qu’elle entend… Ironie du sort ou destin, chacun verra ce qu’il veut dans le parcours du jeune Patrick qui changera totalement de chemin en 1973, à la faveur… d’une guerre ! « C’est un comble, j’étais objecteur de conscience et c’est la guerre du Kippour qui m’a conduit à ce qui allait devenir la grande passion de ma vie : l’archéologie ! » Bloqué durant trois mois sur le site de Karnak, le jeune ingénieur topographe a mis à profit son temps libre pour mesurer les nombreux temples du site antique, ce que les archéologues ne faisaient pas jusqu’alors. « Je me suis fait remarquer comme cela et on m’a demandé si je souhaitais intégrer le très prestigieux Institut Français d’Archéologie Orientale (IFAO), proposition que j’ai déclinée, n’ayant pas obtenu mon diplôme de géomètre. Diplôme que j’obtins rapidement dès mon retour en France. » Surpris, mais flatté de voir que la place lui avait été gardée, Patrick décida d’accepter de retourner en Égypte pour développer la topographie sur les nombreuses fouilles de l’IFAO. « Il faut bien comprendre que chaque fouille est un outrage fait au lieu. Les mesures précises des positions de chaque site, chaque monument et chaque objet sont des données essentielles qui manquaient aux archéologues. Une fouille est un chantier pluridisciplinaire où la topographie est incontournable depuis cette époque, même si au début on me prenait un peu de haut. » Si Patrick est fier de son apport majeur dans l’archéologie française moderne, c’est uniquement l’amour de son métier qui l’a fait rester 20 ans en Égypte, au prix de nombreux sacrifices. « Je sais que vivre au rythme d’un archéologue n’est pas simple pour les proches. La passion de l’Égypte est dévorante au fur et à mesure des connaissances que l’on accumule et des gens fascinants que l’on rencontre. » On ne compte plus les ouvrages de référence auxquels Patrick Deleuze a contribué. Du site du Mastaba d’Ima-Pépi de 2000 avant notre ère, jusqu’au phare d’Alexandrie, en passant par les pyramides de Kheops, il a travaillé sur des fouilles d’envergure internationale. Rentré en France, il poursuivra son travail au sein de l’INRAP*. « Mon métier se traduisait par des absences. Aussi, j’ai fini par faire le choix de ma famille. Mais le terrain est une drogue dure… j’ai négocié un chantier à Sakkara sur lequel j’ai travaillé un mois par an pendant 8 ans ! » Connu, reconnu, décoré des Arts et Lettres, Patrick Deleuze est devenu une personnalité éminente de la recherche universitaire, mais aussi du cercle très fermé des archéologues de l’Egypte antique. Bien plus sensible au soleil d’Orient qu’aux flashs, il a su garder ce qui fait un grand scientifique précurseur : la curiosité et l’humilité. Une très belle rencontre ! * Institut national de recherches archéologiques préventives Père de la topographie archéologique

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