Juvisy Mag | Janvier 2021

// 294 // Janvier 2021 / / Magazine d’informations municipales // 294 // Janvier 2021 // Magazine d’informations municipales 6 7 DOSSIER DOSSIER │ LA CHARTE DE LA LAÏCITÉ Juvisy Grand Paris : Alors que les principes de Laïcité ont été définis en France par la Loi de 1905 et par la Constitution depuis 1946 qui définit dans son article 1 la République comme indivisible, laïque, démocratique et sociale, on pourrait se demander pourquoi une telle charte est nécessaire ? Lamia Bensarsa Reda : C’était un engagement de campagne de l’équipe municipale Juvisy nous Unit. Une charte de la Laïcité sera présentée au Conseil municipal du 4 février 2021. Si pour beaucoup, les principes d’une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ne font en effet pas débat, la Laïcité, elle, peut susciter des interrogations, des rejets de la part de certains ou pire encore de la violence. En la matière, alors que l’actualité est malheureusement riche d’horribles nouvelles avec les attentats islamistes récents, notre devoir est de faire œuvre de pédagogie, de lutter contre les mensonges mais aussi de réaffirmer fermement nos principes. Juvisy Grand Paris : Pour vous, la Laïcité est donc fragile ? Lamia Bensarsa Reda : Non elle ne l’est pas, son expression même est sa force ! Mais elle peut être attaquée par certains qui jouent sur ses subtilités. Je pense qu’elle peut aussi être incomprise de « bonne foi », si je puis dire, mais aussi présentée comme un ennemi du fait religieux, alors qu’elle est tout le contraire. La République ne reconnaît que des citoyens et la Laïcité c’est la liberté pour chacun d’eux de pratiquer ou non une religion, de s’émanciper ou non de dogmes au cours de sa vie, de surmonter les déterminismes de groupes ou de communautés et surtout de n’être influencé par quiconque quant à ses choix de conscience. La Laïcité, c’est tout autant la garantie de pouvoir croire ou ne pas croire librement, qu’une protection que la République apporte à ses citoyens. Cela, il faut le dire et l’expliquer. Juvisy Grand Paris : Vous parlez d’ennemis de la Laïcité, quels sont-ils ? Lamia Bensarsa Reda : Je parle de tous ceux qui veulent imposer des règles religieuses dans l’espace public ou qui souhaitent séparer une partie de la population du reste de la société. Ils sont nombreux à tester la République, à harceler les agents de la Fonction publique - enseignants, policiers ou soignants - à entretenir la confusion entre ce qui relève d’un racisme authentique et condamnable, d’une légitime et légale critique du fait religieux. Nous l’avons encore vu récemment, l’effroyable assassinat de Samuel Paty a mis en lumière un processus de harcèlement de l’enseignant, qui s’est révélé être le premier acte de cette horrible histoire. Malheureusement, cette déstabilisation a non seulement conduit au pire, mais elle a aussi été soutenue par des parents d’élèves, des collègues du professeur, sa hiérarchie mais aussi par des gens qui rejettent l’universalisme français au profit du fait communautaire. J’ajoute que le traitement médiatique et politique de la Laïcité à la française dans le reste du monde n’est pas de nature à apaiser les choses. Je pense à ce qui a été écrit dans de grands journaux américains, New York Times ou Washington Post, qui jugent la France à l’aune du différentialisme, faisant de la Laïcité un objet d’exclusion. Juvisy Grand Paris : Cette charte est- elle une expression laïcarde comme on le disait en 1905 ou laïciste comme on le dit aujourd’hui ? Lamia Bensarsa Reda : La Laïcité ne supporte pas d’être adjectivée à mon sens. On est laïque ou on ne l’est pas. L’expression « laïcarde » ou « laïciste » a une forte connotation péjorative, laissant entendre qu’il y aurait des antagonismes entre la Laïcité et les religions. La Laïcité n’est pas une religion républicaine ! Ceux qui la considèrent ainsi se trompent et lui nuisent. En cela, elle ne peut être renvoyée dos à dos avec quelconque pratique religieuse. La Laïcité est la Loi pour tous et se place donc en France au dessus de la foi, laquelle relève de l’intime ! Je ne crois pas plus en une Laïcité de combat, qu’en une Laïcité de compromis et de dérogations, cela n’a pas de sens. Certes la Loi de 1905 a été amenée à évoluer, mais seulement par le peuple souverain, par le biais de son Parlement ! En aucun cas, ces règles ne peuvent changer sous la contrainte d’une minorité ou d’un groupe. Cette charte est une expression républicaine et rien d’autre. Juvisy Grand Paris : À qui est-elle destinée ? Lamia Bensarsa Reda : À chacun d’entre nous. À l’instar de la Charte de la Laïcité affichée dans les écoles et du formidable travail de pédagogie réalisé par les enseignants pour expliquer celle-ci aux enfants et aux familles, notre charte sera affichée dans les espaces municipaux et associatifs. Vous le savez, les agents municipaux, mais aussi celles et ceux qui travaillent en délégation de service public, sont soumis à la Laïcité et sont en cela garants des règles républicaines. Je veux d’ailleurs saluer les agents de Juvisy pour leur conscience professionnelle et leur sens aigu du service public. L’affichage de la charte est aussi un soutien pour eux, car ils peuvent être confrontés à des usagers qui remettent en cause ces règles, parfois avec violence. Juvisy Grand Paris : Au niveau associatif, qu’apportera la charte ? Lamia Bensarsa Reda : Encore une fois, la charte rappelle des valeurs que chacun est censé connaître. Bien entendu, à Juvisy les partenariats associatifs de la Ville ne souffrent d’aucune entorse à la Laïcité, mais j’ai voulu travailler avec les associations à la conception de cette charte, car beaucoup d’entre elles exercent un rôle pédagogique, notamment au contact des enfants. Comment pourrait-on envisager qu’une association sportive soit aussi le vecteur d’idéaux ou de pratiques religieuses ? La question ne se pose pas à Juvisy, mais dans des villes voisines oui ! À l’image de micro- partis politiques déguisés en associations, il existe aussi des zones grises entre des structures culturelles relevant de la Loi de 1901, dont l’activité est aussi cultuelle, rendant impossible un subventionnement public et relevant ainsi de la Loi de 1905. Toutes ces distinctions, nous voulons les écrire noir sur blanc dans notre charte, laquelle devra être signée par chacune des associations juvisiennes actuelles et futures. C’est un engagement républicain. Juvisy Grand Paris : Sur la carte de vœux de l’équipe municipale, la Laïcité est associée à la Liberté, l’Égalité et la Fraternité. Vous pensez que notre devise doit changer ? Lamia Bensarsa Reda : Pourquoi pas ! Elle figure parmi les droits et les libertés fondamentaux garantis par la Constitution, notre Loi suprême. Je pense sincèrement que la Laïcité est une valeur essentielle de la République et qu’elle est finalement l’une des conditions d’existence des trois autres valeurs. Je ne sais pas s’il faut l’ajouter au fronton des mairies, mais je sais qu’elle doit prendre la place qui est la sienne dans le cœur des citoyens et que pour cela, son nom doit être affiché sur le mur des espaces communaux. Si elle n’est pas sur la mairie, elle doit être dans la mairie ! La Laïcité, c’est quoi ? Il faut commencer par expliquer ce que la Laïcité n’est pas : • elle n’est pas une religion, • elle n’est pas une opinion comme une autre. La Laïcité, c’est d’abord la liberté d’avoir une opinion, de croire ou de ne pas croire et de changer de conviction tout au long de sa vie dans le strict respect de la Loi et de l’ordre public. C’est un principe fondateur de la République. Selon le Conseil constitutionnel (décision du 21 février 2013), résultent du principe de laïcité : • le respect de toutes les croyances et l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion ; • la garantie du libre exercice des cultes ; • la neutralité de l’État ; • l’absence de culte officiel et de salariat du clergé. Ces principes sont définis par la Loi du 9 décembre 1905, dite Loi Aristide Briand. La Laïcité exposée dans les écoles La Laïcité est un principe fondateur de l’école républicaine. Comme tel, il est affiché dans chacune des écoles françaises. L’école garantit la laïcité des personnels qui ne peuvent pas manifester leurs convictions religieuses dans le cadre de leurs fonctions et la laïcité des enseignements en excluant toute instruction religieuse ou prosélytisme. Cela n’interdit pas pour autant de parler des religions, mais celles-ci sont abordées comme des faits historiques. Les élèves, doivent suivre ces enseignements et ne pas porter de signes religieux ostensibles à l’école. Dans le cadre de la Journée de la Laïcité du 9 décembre, les enseignants des écoles maternelles Dolto et La Fontaine ont réalisé des expositions sur ce thème. Fruit de nombreuses réflexions et d’échanges à la suite de l’hommage rendu à Samuel Paty, ce travail remarquable a été présenté aux familles en extérieur du fait de la crise sanitaire.

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